« Pig » : La rédemption tant attendue de Nicolas Cage
Il mène sa vie une manette à la main, absorbant…
Il y a longtemps que Nicolas Cage n’avait pas vraiment fait honneur à son sang et à son rang. Le prince vieillissant de la famille Coppola est de retour, et le débat s’ouvrira de savoir si son rôle dans Pig, de Michael Sarnoski, n’est pas son plus beau. Malgré son titre.
Un chasseur de truffes vit en ermite dans la nature sauvage de l’Oregon, quand l’enlèvement de sa truie truffière le pousse à retourner vers la civilisation à Portland où il devra faire face aux démons de son passé.
Notre Grand Prix à nous
Le synopsis ne promettait pas grand chose. Un énième Nicolas Cage (on a parfois pu perdre confiance en lui, ces dernières années) sur un ermite qui perd sa truie truffière. Le neveu de Francis Ford, perdu au milieu des arbres centenaires et des si jolis verdiers, avec la barbe et les cheveux longs du type qui a un peu tout abandonné : on avoue qu’on était pas forcément tous de suite convaincus. On n’aurait pas pu plus se tromper. S’il fallait refaire Deauville, c’est à Pig que nous donnerions le Grand Prix du festival – même si le vainqueur Down with the King avait beaucoup, beaucoup de qualités. Le film de Sarnoski était au-dessus du lot, loin devant comme Senna à Magny-Cours : beau, tendu, violent, plein d’émotion, une scène finale à pleurer sur I’m on fire du Boss Springsteen.
Le plus bel aspect du film, c’est l’atmosphère douce-amère que Sarnoski et son chef opérateur Pat Scola réussissent à imposer. Une sorte de road trip à travers un passé douloureux puis finalement complètement assumé. Une véritable errance aux accents parfois mystiques d’un vieux sage qui recherche bien plus que son animal de compagnie. L’œuvre fait montre d’une humanité désarmante en explorant les rapports ruinés d’un père absent avec son fils qui n’attend que sa validation, sa reconnaissance. Elle est aussi un formidable film sur l’amour et le deuil, une déclaration honnête et romantique à ceux qui sont partis et dont le souvenir fait toujours autant de bien que de mal.
Nic Cage au meilleur de sa forme
Et quand on parle du meilleur de sa forme, on entend bien celle de Leaving Las Vegas (Mike Figgis, 1995), qui valait à l’acteur un premier Oscar à leur 68e cérémonie annuelle – on se permet d’ajouter ici l’épithète « premier » en caressant le doux espoir que son rôle dans Pig lui en vaille un deuxième. On s’avance peut-être un peu sous le coup de l’excitation, mais le comédien y est sincèrement époustouflant. Magnétique, envahissant : il porte le film, déjà particulièrement solide, sur sa seule implication. Une récompense de ce niveau ne nous étonnerait pas ; et puis on a beau gentiment le railler pour ses derniers choix de carrière, le fait est qu’on reste des inconditionnels du Cage, découvert dans The Rock (Michael Bay, 1996) avant de s’intéresser à tous ses petits chefs d’œuvres des années 1980 et 1990 (Les Coppola, Birdy, Sailor et Lula, 8MM…).
Si l’on devait résumer les nombreuses raisons pour lesquelles Pig est le film à voir de cette semaine, on dira qu’il vaut avant tout pour son écriture fine et intelligente ; Nicolas Cage, touchant et puissamment présent ; l’atmosphère visuelle et musicale, calme et mesurée, qui donne au film une étrange impression de rêve, un voyage onirique dont on ne sort pas tout à fait indemne, en tout cas pas tout à fait certain de l’avoir véritablement vécu ; la dernière demi-heure ; la première heure ; le film entier. Pig est un chef d’œuvre d’indépendance, une pépite comme il en arrive trop rarement. Ne manque pas cette superbe occasion de le voir en salle.