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« It’s a Sin » sur Canal+ : Le triomphe de l’amour au temps du SIDA

« It’s a Sin » sur Canal+ : Le triomphe de l’amour au temps du SIDA

Roxane Thene
La dernière réalisation de Russell T. Davies est disponible sur MyCanal depuis le 22 mars. On y suit les aventures de trois jeunes homosexuels venus tenter la grande aventure à Londres, dans les années 80, alors que le SIDA s’apprête à dévaster la communauté gay. On te donne notre avis après avoir vu les 5 épisodes.

La série débute gaiement : on rit, on profite, on s’amuse, on fait l’amour, on goûte à la vie. Dès le départ, joie de vivre, sensibilité et malice nous font prendre d’affection pour Ritchie, Roscoes, Colin et Jill – la bonne copine du groupe. Tous se retrouvent célibataires et colocataires, enchaînent les soirées endiablées. Puis, la fête se termine et la réalité nous éclate à la figure, rappelant que l’épidémie du SIDA est bien présente et compte tout emporter sur son passage. En 1980, la réalité est simple : le diagnostic d’une séropositivité était synonyme d’une condamnation foudroyante et douloureuse.

Les protagonistes repoussent narquois cette rumeur venue d’Amérique : un énigmatique virus qui décimerait la communauté homosexuelle ? La série s’empare à la perfection de cette époque où le SIDA n’était encore qu’un spectre obscur, méconnu et incompris. L’approche est frontale par le prisme du quotidien, tout en étant traitée avec adresse et discernement : les personnages n’ont aucune connaissance de cette nouvelle maladie, la profession médicale ne souhaite pas s’exprimer, les journaux se censurent… L’épouvantable hécatombe finit cependant par les rattraper et réduire leur innocence à néant.

« J’ai regardé ailleurs pendant des années. Enfin, je peux mettre le sida au cœur d’une fiction », a confié Russell T. Davies dans The Guardian

Le témoignage combatif des années SIDA

Avec It’s a sin, Russel T. Davies renoue avec ses combats de prédilection : la jeunesse homosexuelle confrontée à l’épuisante homophobie, sur fond d’épidémie. À travers cette mini-série, le réalisateur et le showrunner Peter Hoar racontent les stigmatisations, les insultes et les agressions du quotidien aussi bien que l’homophobie institutionnelle. L’avilissement, l’affolement, la crainte, la méfiance aussi, quand les séropositifs était vus comme des pestiférés. Davies s’adresse autant aux jeunes générations ignorant l’envergure de la tragédie qu’à celles qui « ont préféré oublier cette époque si pénible », comme il le dit lui-même. Il dévoile un portrait tragique et bouleversant du passé, contournant les discours moralistes.

S’il est difficile de retenir ses larmes au fil des 5 épisodes, le réalisateur s’interdit la complaisance et l’apitoiement et insiste, au contraire, sur la volonté et la beauté de vivre dans l’amour et l’amitié. Portée par une distribution formidable et des personnages aussi naturels que captivants, It’s a sin ne laisse personne impassible et indifférent. Encore vécu comme une humiliation stigmatisante, ce mal « bousille » tout sur son passage et en premier l’estime de soi. L’unique défaut de cette série, s’il fallait en trouver un, serait éventuellement qu’elle soit aussi courte. Mais finalement, le format est entièrement cohérent et réfléchi, soutenu par une bande originale très vintage. Malgré les drames vécus par ses personnages, It’s a sin est une œuvre rayonnant d’espoir, d’insouciance et de discernement. 

IT’S A SIN
De Russell T. Davies
Avec Olly Alexander, Omari Douglas, Callum Scott Howells
Disponible sur MyCanal

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