« Unorthodox » : La série coup de poing dans le milieu juif ultraorthodoxe
Amatrice du kitsch, de vieux fromages et de pop bien…
Unorthodox, produit par Netflix, est une véritable mini-série coup de poing qui ne laisse pas indemne. Pendant 4 heures, le spectateur est immergé dans la communauté autarcique juive ultra-orthodoxe. Comme le personnage principal, il est presque étouffé par l’orthopraxie mais aussi l’isolement dans lequel vivent ses pratiquants.
Arty Magazine te donne 6 bonnes raisons de regarder Unorthodox – ou mieux, de binge-watcher la série.
Une plongée immersive dans la communauté hassidique
Cette mini-série, aux airs de documentaire, raconte une communauté qui est rarement mise sous le feu des projecteurs, celle des juifs ultra-orthodoxes. Ceux-ci vivent en autarcie à Williamsburg, un quartier de Brooklyn communément surnommé « La petite Jérusalem ». Leur culture, qui se fait discrète, est souvent méconnue du grand public. Et pour cause, considérés comme des rigoristes, les juifs ultra-orthodoxes vivent sans smartphone, sans Google avec pour seul credo d’être une machine à procréer pour les unes, et un bon travailleur pour les autres.
L’histoire vraie de Deborah Feldman
On ne sait pas pourquoi, les histoires inspirées de faits réels nous touchent plus, en ce qu’elles peuvent nous être proches, parce que l’on a profondément du mal à plonger dans une histoire tant qu’on ne s’y est pas identifié. Unorthodox n’échappe pas à la règle, puisque la série est inspirée du livre autobiographique Unorthodox : The Scandalous Rejection of My Hasidic Roots de Deborah Feldman, sorti en 2012. Mariée à 17 ans et mère à 19 ans, la romancière a décidé de s’enfuir avec son bébé de 3 ans en 2009.
La série prend beaucoup de libertés puisqu’en réalité, seule les scènes au sein de la communauté Satmar sont véridiques. Pour celles qui se passent au présent en plein Berlin, c’est une fiction écrite par Anna Winger, la productrice. Néanmoins, Deborah Feldman a validé chaque écart à son histoire. D’ailleurs, pour parler juste, sans jamais juger, la co-créatrice Alexa Karolinski a fait appel à Eli Rosen, acteur et spécialiste de la culture Yiddish.
Le Yiddish, justement
Si Unorthodox n’est pas la première œuvre cinématographique portée sur la communauté hassidique, elle est la première œuvre dans laquelle le Yiddish est mis à l’honneur. Pour cause, une grande partie de la série est parlée en Yiddish. Bien que considérée comme langue-monde pour certains, elle est depuis quelques années déclarée en péril par l’Unesco.
La condition féminine chez les juifs ultra-orthodoxes
Ce qui régit la communauté juive et ses préceptes, c’est la peur d’une nouvelle Shoah. Chaque membre de la communauté porte sur ses épaules le poids des 6 millions de disparus. La mission de la femme est donc de repeupler, coûte que coûte. Chaque activité de la journée est ritualisée, puisque demandée par Dieu et effectuée pour Dieu. Il n’y a donc pas de place pour l’être humain, et encore moins pour la femme. Chacun s’immisce dans la vie des autres, jusque dans sa vie sexuelle.
La femme doit être une bonne ménagère et une bonne mère. Elle doit, par exemple, se raser le crâne arrivée à un certain âge, se laver dans un bain spécifique après chaque période de menstruation, mais aussi donner son corps à son mari tous les vendredis soir. Chaque rite est cristallisé et rendu poignant car il est vu et vécu à travers les yeux d’Esti.
Un monde contemporain parfois absurde
La série se déroule à deux niveaux : d’un côté des retours en arrière sur ce qu’était la vie d’Esti au sein de la communauté, avant sa fuite, et de l’autre le « présent » sur sa nouvelle vie qui démarre à Berlin. C’est à ce niveau que l’on ressent le décalage avec les usages de nos sociétés contemporaines. Il est d’ailleurs accentué lorsqu’elle rencontre un groupe de musiciens internationaux au sein duquel se trouve notamment, une jeune juive israélienne qui a toujours vécu à Berlin. Alors qu’au sein de la communauté, la recette est celle de la discipline, c’est à Berlin qu’Esti goûte au sel de l’imprévu, celui qui relève la vie.
La performance éblouissante des acteurs
Ce qui crée la magie d’un scénario aussi haletant, c’est en partie grâce à la performance des acteurs et en particulier de Shira Haas, qui joue Esther. Frêle créature androgyne, elle réussit à faire passer chaque émotion que traverse son personnage en un regard – parfois fait de tendresse, parfois fait d’acier. Les personnages de Yanky, mari d’Esti, et de son cousin Moische, interprétés respectivement par Amit Rahav et Jeff Wilbush, sont joués avec une grande complexité. Dans cette communauté, il n’y a ni haine ni incompréhension, mais bien parfois un désaccord irrémédiable entre un monde isolé et un monde moderne.