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« The French Dispatch » : Wes Anderson livre son ode à la culture française

« The French Dispatch » : Wes Anderson livre son ode à la culture française

Thierry Champy

Quatre ans séparent L’Île aux chiens, fable écologique mordante réalisée en stop motion, de The French Dispatch. Présenté en compétition lors de la 74ème édition du Festival de Cannes, le réalisateur américain revient et nous livre cette fois, une fiction sur le journalisme avec une francophilie débordante.

XXe siècle : le French Dispatch, revue américaine dont le siège réside même à Ennui-sur-Blasé, vole en éclat le jour où son rédacteur en chef, Arthur Howitzer Jr., meurt d’une crise cardiaque. Trois articles anciennement publiés renaissent de leurs cendres dans un dernier numéro en hommage à son créateur.

Dans sa petite camionnette, Wes Anderson, rédacteur en chef du French Dispatch

Déferlement de références

Au même titre que son compatriote Quentin Tarantino, Wes Anderson ne cesse de se référer à ses aïeux de cinéma : Kurosawa, Bergman, Allen, Kubrick et Bresson en l’occurrence. Après avoir déclaré sa flamme à la culture japonaise avec L’Île aux chiens, la France est dorénavant à l’honneur avec The French Dispatch. Les nombreux clins d’œil aux scènes implacables de Jacques Demy, au réalisme de Renoir, aux polars de Melville, aux pitreries de Tati, aux dialogues absurdes de Godard et à l’ambiance juvénile de Truffaut ne sont pas anodins – et même les peintres tels que Van Gogh pour le personnage de l’artiste déchu et Fujita pour celui du chef étoilé y sont aussi référés.

L’histoire se passe à Ennui-sur-Blasé, référence sans équivoque au Paris des années 50-60 avec ses bouches de métro marquées par Hector Guimard ; journalistes à la frange enroulée ; cyclistes, béret sur la tête et baguette sous le coude bien entendu, déambulants d’un arrondissement à un autre ; étudiants intellectuels, clope au bec, sirotant leur Cabernet Sauvignon ; marchands d’art, à la moustache aiguisée, assoiffés de nouvelles toiles ; gardiens de la paix avec pèlerine, matraque à la ceinture. Aussi cliché soit-il, il n’en demeure pas moins que l’œuvre filmique est l’aboutissement d’une France tant fantasmée par le cinéaste texan.

Bill Murray, Wally Wolodarsky et Jeffrey Wright dans une même pièce… Voilà le genre de moments que peut offrir le casting d’un Wes Anderson

Wes Anderson fait du Wes Anderson

The French Dispatch s’apparente plus à une démonstration de savoir-faire voire un étalage du talent de Wes Anderson : esthétisme marqué, plans quadrillés et millimétrés aux couleurs bigarrées, abondance de travelings, comique de situation… Sans oublier bien entendu son goût prononcé pour le vintage, autant sur la mode que pour la musique – notons l’incontournable Aline de Christophe reprise par Jarvis Cocker. À bord du Darjeeling Limited et Moonrise Kingdom avaient d’ores et déjà exposé, de façon distincte, l’étendue de son travail. Nul n’est désormais indifférent au style andersonien.

Après avoir passé en revue les multiples références, le film souffre davantage sur le plan scénaristique. Le spectateur suit laborieusement ces trois histoires (ou quatre ?) sous la forme de sketchs : l’artiste déchu au polar gastronomique en passant par le clin d’œil à mai 68 et accessoirement, la mort du rédacteur en chef. Le réalisateur de The Grand Budapest Hotel se met en péril avec ce déferlement d’informations et dialogues saccadés : on suit l’intrigue telle la lecture d’une revue. Qui plus est, la saveur nostalgique et le drame se montrent difficilement saisissables hormis le chapitre de l’artiste déchu, magnifiquement interprété par Benicio Del Toro. En définitive, The French Dispatch ravira les admirateurs de Wes Anderson, n’en déplaise aux cinéphiles intransigeants qui pourront y voir une forme un peu plus insipide.

THE FRENCH DISPATCH
Réalisé par Wes Anderson
Avec Bill Murray, Benicio Del Toro, Léa Seydoux, Adrien Brody, Owen Wilson, Timothée Chalamet, Lyna Khoudri, Frances Mc Dorman, Cécile de France, Guillaume Gallienne, Tilda Swinton, Saoirse Ronan…
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