[EXCLU] Si vous avez grandi avec Depeche Mode et Talking Heads, vous allez valider l’album d’Overlogic
Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
Professeure de Lettres à la ville et journaliste à la…
Venu tout droit d’Italie, le duo Overlogic ravive la flamme de nos premières amours New Wave pour les Depeche Mode et les Talking Heads. Composé des amis d’enfance Francesco Cavasinni (synthétiseurs, chant) et Emanuele Orsini (batterie, drum machine), le groupe défend une musique vintage et référencée qui tape en plein dans le mille. Leur album Delife est à découvrir en exclusivité sur Arty Paris.
Les deux comparses Francesco Cavasinni et Emanuele Orsini font figure de Derniers des Mohicans, alors que la conquête des charts est gagnée par les troupes du général Pop et son adjoint Urbain. Encore plus vrai en Italie, où de leur propre aveu, la scène électro et new wave est une niche en voie de disparition. Élégant et enlevé, leur second album Delife aurait trouvé sans difficultés son public dans les années 80, au gré de multiples rotations sur MTV. De par leur chant en anglais, leur production percussive, et leur introduction de sonorités electro, Voix-de-Faucon et Baguettes-Hardies ne se placent pas en retrait de leur époque, ils s’en élancent à la poursuite. Si on ne connaît pas le dénouement de leur histoire, ils tendent à perpétuer un genre plutôt qu’à l’enfermer dans une case moribonde. La tribu de la New Wave a encore de belles années devant elle.
Marin : Ciao Francesco et Emanuele. Votre univers m’a tout de suite parlé, à moi qui suis un enfant de la French Touch avec les Daft Punk et Justice, mais aussi Digitalism et The Chemical Brothers dont les influences New Wave sont manifestes. Quels artistes ont forgé votre identité ?
Francesco : Ciao Marin, c’est un plaisir de te rencontrer ! Emanuele et moi, on se connaît depuis 20 ans, on a grandi en écoutant Depeche Mode, Nine Inch Nails et Talking Heads. Avant de former Overlogic, on a aussi écouté des groupes plus contemporains comme M83, MGMT, Animal Collective, LCD Soundsystem, Friendly Fires, en plus de tous ceux que tu as cités et de beaucoup d’autres. Ça nous a forcément influencés et nous a créé une certaine affinité avec l’électro-pop.
M. Vous avez sorti en 2016 votre premier EP autoproduit From Where?. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur cet EP ?
Emanuele : A posteriori, on peut considérer From Where comme une expérimentation, une sorte de test audio pour le public. Toutefois, l’EP avait un concept artistique bien précis, il nous a permis de prendre confiance en tant que duo et de commencer officiellement en tant qu’Overlogic. Tout a beaucoup changé à partir de ce moment-là, et ça a aussi beaucoup changé notre vie. Chaque œuvre que l’on produit reflète plus ou moins nos expériences personnelles et artistiques.
M. Votre passion pour les synthés et les percussions s’entend immédiatement sur vos productions. Comment travaillez-vous en studio pour leur donner toute cette profondeur texturée ? Ce travail peut être très différent selon les morceaux Pick, click, shit ou Whatever you may fear ?
F. Nous partons d’une idée brute, comme une mélodie au synthé ou un enchaînement de batterie (ou les deux). Parfois, sans crier gare, la structure entière d’un titre peut sortir du premier coup : si le morceau fonctionne en live, alors il fonctionnera aussi en phase d’enregistrement, avec tous les ajouts possibles.
E. Pick, click, shit a été composé à partir d’un rythme de batterie que j’ai proposé et que Francesco a complété avec ses arpégiateurs. Whatever you may fear à l’inverse, est partie d’une idée de Francesco sur laquelle nous avons travaillé en studio, en chamboulant complètement l’arrangement du morceau.
M. Nous n’avons plus beaucoup de représentants en France de cette musique électronique dense, vintage et modulée. Quel est l’état actuel de la scène en Italie ?
E. En Italie, la scène musicale électronique est encore moins connue : c’est un genre très de niche qui a eu du mal à s’implanter sur notre territoire. Drink to me est peut-être un groupe proche de notre proposition, mais nous sommes dans la grande famille de ceux qui font de la musique électronique. Parfois c’est un avantage d’être peu nombreux, mais c’est aussi un inconvénient parce que c’est difficile de trouver son public.
M. Le clip de Whatever you may fear réalisé par Elide Blind avec la danseuse et chorégraphe Giulia Chiarantini m’a particulièrement marqué par son audace plastique et poétique. Pouvez-vous me parler de cette collaboration ?
F. J’avais un scénario en tête pour le clip de Whatever you may fear, mais il fallait une interprétation visuelle qui puisse en exprimer le message. Nous nous sommes donc adressés à Elide Blind et Giulia, deux professionnelles de ce domaine.
E. Je connais Elide depuis longtemps et j’ai toujours apprécié son style très singulier. Whatever semblait être le morceau parfait pour elle, du coup, nous nous sommes penchés sur le storyboard et en quelques semaines, nous avions déjà une première mouture. Le concept était simple : exprimer les peurs dont parle la chanson avec la danse et des motifs lo-fi et surréalistes. Giulia, une amie de la réalisatrice, a fait tout le reste : elle a été exceptionnelle.
M. Ce disque propose aussi une vision politisée qui « vise à décrire l’insécurité, la fragilité et l’apathie » selon vos propres mots. Avez-vous conçu un storytelling autour de ces neufs titres ?
F. Plus que de raconter une histoire, Delife décrit « neuf situations d’inaptitude différentes ». Chaque titre a son histoire et sa signification (ou peut-être qu’il n’en a pas ?) mais dans l’ensemble, l’album a été créé à partir d’un concept qui a pour objet direct les faiblesses de l’humain et de la société contemporaine. Sarcasme, cynisme et ironie sont au service des textes et de la musique, parce que ça nous semblait justement un type de communication efficace pour le sens qu’on voulait donner au disque.
M. Et comme c’est la tradition chez Arty Paris, quelle est votre définition d’un artiste ?
E. Pour nous, un artiste est une personne qui a quelque chose à dire et qui l’exprime d’une manière unique.