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Alban Claudin : le subtil mélange de la pop et du piano

Alban Claudin : le subtil mélange de la pop et du piano

Anoussa Chea

Grâce à un univers pop et des mélodies entêtantes, Alban Claudin parvient à enchanter et émouvoir avec It’s a long way to happiness, son premier album piano.

Diplômé du Conservatoire, fin connaisseur des claviers électroniques et batteur, claviériste de Clara Luciani, collaborateur de Voyou et de Yelle et compositeur de mélodies pour des courts-métrages et des documentaires (Louis Vuitton, Chanel, Van Cleef & Arpels), Alban Claudin se lance aujourd’hui en solo avec son premier album piano, It’s a Long Way To Happiness. Distillant avec brio des influences pop au cœur des notes de piano, ce disque est une réelle bouffée d’oxygène, de légèreté et nous transporte dans une douce rêverie dont on ne voudrait jamais sortir. Tel un bonbon rempli d’une douceur apaisante et d’une mélancolie réconfortante, on apprécie chaque seconde de cet album mélodieux, poétique et produit avec sensibilité.

Quelques jours avant la sortie de son album, rencontre au Bar à Bulles dans le 18ème arrondissement, pour faire connaissance avec Alban. Et force est de constater que si le chemin vers le bonheur est un long et lent processus, le jeune pianiste et ses 11 ritournelles réussissent à nous montrer la voie à emprunter que nous suivons avec un plaisir non dissimulé

Anoussa : Comment vas-tu à 15  jours de la sortie de ton premier album It’s a long way to happiness (ndlr : L’interview a été réalisée fin février) ?

Alban Claudin : Je m’impatiente, je m’ennuie et j’ai trop hâte.

A. : Qu’est ce que ça fait de sortir un premier album piano dans un contexte pareil ?

AC. : C’est un moment qui est forcément particulier. Mais, je pense qu’il peut faire du bien aux gens, encore plus que d’habitude. Certains me disent que ça les a fait pleurer et je m’en excuse d‘avance, mais s’il peut faire du bien, tant mieux.

A. : Comment est née ton histoire avec le piano ?

AC. : Quand j’étais petit, je jouais, tapotais sur les aiguës et les graves et inventais des histoires avec les gentils et les méchants. J’ai toujours un peu composé des choses au piano mais ça m’a demandé beaucoup de temps pour prendre conscience que ça pouvait n’être que du piano et que ça puisse exister en tant que tel. En faisant d’autres musiques et en étant entouré d’autres chanteurs, je ne voyais pas l’intérêt de faire un album piano. Mais, il y a eu moment où la musique que je faisais et mon état d’esprit ont réussi à se rejoindre et j’ai réussi à assumer tout ça. C’est un cheminement de vie.

A. : Quelle formation as-tu suivie ?

AC. : J’ai pris des cours de piano à l’âge de 5 ans. J’ai eu la chance d’avoir des profs cools qui me faisaient jouer à la fois les Beatles, Mozart ou ce qui passait à la radio. Je n’ai pas commencé par le Conservatoire, ce qui est une chance parce que ça peut être trop cadré et cela peut parfois dégoûter. Après plus de 10 ans de cours, c’est à ce moment que j’ai décidé d’aller au Conservatoire parce que j’ai eu envie de faire davantage de classique et d’approfondir la chose.

 

Au même moment, j’avais un groupe de rock dans lequel je jouais de la batterie. Le Conservatoire m’a ouvert l’esprit (ce qui peut être un peu compliqué à cet âge-là). Mon cheminement personnel m’a aussi fait comprendre que tout était libre dans la musique, d’un point de vue artistique. Mais, ça a été difficile parce qu’au début, je composais des choses qui pouvaient partir dans tous les sens. J’ai dû apprendre à synthétiser avec une musique qui soit la mienne et personnelle.

Alban Claudin s’élance au clavier du Bar à Bulles sous l’objectif d’Anoussa Chea
A. : Quelle est la genèse de cet album ? Comment a t-il vu le jour ?

AC. : Depuis que je suis ado, je compose avec ce format assez pop de 3 minutes, couplets / refrains. J’y ai pensé plus sérieusement vers 20 ans. La découverte de certains artistes et surtout la rencontre avec mon éditeur m’ont poussé à faire cet album piano. J’ai commencé sa composition en 2015/2016. Le plus gros du travail a été fait en mai 2018, entre la tournée de printemps et des festivals de Clara Luciani. L’album a pris 5 ans parce que je voulais trouver une une accroche différente. J’étais aussi en tournée pendant 3/4 ans avec d’autres artistes qui m’ont apporté une certaine sagesse.

A. : Tu viens de mentionner Clara Luciani que tu as accompagnée au clavier. Cela a-t-il nourri ta création et tes compositions ?

AC. : Avec Clara et le reste de l’équipe, on a passé 3/4 ans ensemble. C’est une telle aventure de vie, on est tous très soudés et très potes que ça ne laisse pas indifférent. On a beaucoup voyagé et j’ai notamment essayé d’exprimer ces moments en bus, en van, en train, en avion dans ma musique. Ce sont des choses qui m’ont marqué. Pendant la tournée, je passais mon temps libre à la campagne à ne rien faire et me promener dans des espaces les plus vastes, les plus vides d’humains. Ça a influencé inconsciemment ma musique.

A. : Composais-tu quand tu étais en tournée ?

AC. : J’ai essayé mais ça n’a pas marché. Tu dors mal et tu manges n’importe comment. Je crois moyennement à l’inspiration qui vient directement. Seuls les vieux sages arrivent à le faire. Pour moi, c’est vraiment un travail : je m’installe, je vais au studio – même s’il est chez moi la moitié du temps quand je suis à la campagne – je fais l’effort de m’habiller, j’arrive à un endroit, je cherche et c’est comme ça que je trouve.

A. : Quand on écoute ton album, on s’aperçoit rapidement que les morceaux ne relèvent pas du registre classique mais plutôt de celui de la pop…

AC. : On me parle souvent de Satie ou de Yann Tiersen, que j’ai joués, mais je n’ai pas été influencé par le classique. J’estime que Beach House est le groupe qui m’a le plus influencé ces dernières années de par leurs accords, leurs arpèges, leurs sonorités. Chilly Gonzales m’a aussi aidé à passer un cap et le pianiste néerlandais Joep Beving. Ces 2 pianistes ne m’ont pas inspiré dans le style parce que nos musiques ne sont pas proches – mis à part qu’on joue du piano – mais ils m‘ont fait comprendre qu’on pouvait faire de la musique instrumentale et que ce n’est pas forcément désincarné. Dans la musique instrumentale, on ne sait pas qui l’a faite et les gens s’en foutent un peu. Alors que Chilly Gonzalez et Joep Beving se mettent en avant et incarnent vraiment leur musique. On ne se dit pas qu’ils ont composé leur musique dans une cabane au fin fond de la forêt. Il y a un projet, les choses se tiennent, il y a du suivi, c’est vraiment artistique.

A. : Ta musique est également très adaptée pour figurer dans des films…

AC. : J’ai fait de la musique à l’image pour des courts métrages ou des marques mais je n’ai pas du tout cherché à ce que mes morceaux collent pour faire de la musique à l’image. C’est aussi dans l’air du temps de retrouver ce genre de musique dans des films. On est revenu à du piano très mélodique et assez simple, particulièrement pour les films d’auteur.

« Je n’ai pas fait quelque chose de trop facile, j’ai réussi à faire quelque chose de vraiment sincère et qui me ressemble » © Anoussa Chea
A. : Tu as testé différentes manières d’enregistrer pour donner une production et un son particulier à ton album. Comment as-tu procédé ?

AC. : En passant ces années à chercher, à attendre et à être patient. J’ai utilisé beaucoup de pianos et des effets qui sont utilisés dans l’électro alors que je ne suis pas un spécialiste de l’électro. Toutes les réverbs que j’utilise ne sont pas des effets que l’on trouve dans le classique ni dans la pop mais plutôt dans des musiques de films ou dans l’électro. J’ai aussi beaucoup travaillé en faisant des loops. Dans l’album, il y a 2 types de morceaux : ceux qui sont très piano solo et ceux qui sont davantage produits, que j’ai imaginés comme si j’étais directeur artistique d’un groupe en studio. Pour ces morceaux, j’ai tout enregistré séparément et j’ai ensuite tout traité différemment comme pour un travail de production. C’est en ça que je pense avoir un peu innové et trouvé un son spécial. Je n’ai pas fait quelque chose de trop facile, j’ai réussi à faire quelque chose de vraiment sincère et qui me ressemble.

A. : Tes 2 premiers singles Dandelion et It’s a long way to happiness ont reçu un très bon accueil de la part du public. Comment l’expliques-tu ?

AC. : Je ne m’attendais pas à grand-chose mais comme tu l’as dit, on est sur quelque chose de très pop. J’essaie d’incarner le projet et que ça ne soit pas juste de la musique, qu’on puisse mettre un visage sur un nom, un nom sur la musique et tout ce qui va autour. J’essaie toujours de faire de la musique pour qu’elle soit accessible au plus de monde possible. Je ne veux pas être dans une niche. La musique que j’écoute n’est pas de la musique de niche. J’écoute en ce moment Ariana Grande, Hervé, Beach House mais même dans la musique classique que j’écoute, il y a un rapport fort à la mélodie. La mélodie est l’un des vecteurs les plus touchants. J’ai vraiment travaillé les mélodies pour qu’on puisse les chanter ou les siffler après les avoir entendues. C’était mon but ultime.

A. : Comment décrirais-tu ton album en 3 mots ?

AC. : Apaisant, beaucoup d’espoir, mélancolie-heureuse. II n’y a pas de mot en français pour synthétiser ces 2 termes. En portugais, il y a le mot saudade. Même si ma musique n’est pas heureuse – au sens où tu ne peux pas danser dessus – j’essaie de provoquer l’espoir, de faire en sorte qu’elle élève plutôt qu’elle ne plombe. J’espère qu’il y a la double lecture et qu’on puisse aller dans les 2 moods.

A. : On retrouve également cette mélancolie dans tes clips…

AC. : Pour la musique, j’ai tout fait seul de A à Z. Pour les clips, je fais confiance à Maxime Charden qui est un ami qui me connaît depuis longtemps. C’est un génie qui a 12 milliards d’idées à la seconde. Je lui fais entièrement confiance pour retranscrire ce qu’il y a dans ma musique et ce que je suis.

A. : L’image semble importante pour toi ?

AC. : C’est très important que ça passe par les photos ou sur les réseaux, c’est quelque chose vers lequel je vais volontiers. Les réseaux sont aussi, pour l’instant, la seule façon d’exister et d’avoir un contact direct avec le public, même si je préférerais faire plus de concerts et de vraies sessions.

A. : Pourquoi avoir appelé cet album It’s a long way to happiness ?

AC. : En tournée, il y a des jours où tu vis des trucs de ouf et des jours où il ne se passe rien. Quand j’avais un peu de temps, j’allais me promener des heures dans la forêt et je me suis rendu compte que le bonheur ne venait que de soi, qu’il fallait le chercher en soi et qu’il ne pouvait pas venir de choses extérieures.

A. : Quelle est ta conception du bonheur ?

AC. : Il n’y a pas de recette miracle, c’est vraiment quelque chose qui est propre à chacun. Je pense qu’il faut arriver à être aligné et en phase avec ce qu’on désire et ça passe aussi par de la bienveillance envers soi-même et envers les autres.

A. : On arrive à la fin de notre interview et à la question signature Arty Magazine. Quelle est ta définition d’un artiste ?

AC. : C’est quelqu’un qui arrive à transmettre ce qui n’est pas palpable, ce qui est de l’ordre du rêve, qui va réussir à faire prendre conscience de ce qui est inconscient, irréel et le traduire d’une certaine façon pour que ça devienne presque palpable à travers les différents sens, que ça soit par la vision, l’odorat, le goût, l’ouïe.

It’s a long way to happiness d’Alban Claudin est disponible sur Spotify.

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