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Manu Delago : « Ma musique est un tremplin pour délivrer des messages qui comptent »

Manu Delago : « Ma musique est un tremplin pour délivrer des messages qui comptent »

Camille Leigh

Accompagné d’un ensemble de neuf musiciens, Manu Delago nous entraîne au rythme des cycles du sommeil avec l’édition live de son album Circadian. Le musicien et percussionniste autrichien a fait un détour par Paris pour donner un concert vivifiant au 360 Paris Music Factory.

Le 15 octobre dernier, Manu Delago nous donnait rendez-vous au 360 Paris Music Factory amputé de la moitié de ses sièges. Une once de gravité dans le cœur, nous avions alors le triste pressentiment que 2020 nous offrait son dernier concert. Ce soir-là, le musicien autrichien, fasciné par les rythmes circadiens, nous entraîne dans un voyage apaisant, à bord de son train du sommeil.

Circadian face à l’assoupissement du live

La salle, plongée dans une pénombre digne d’une chambre à l’heure du coucher, s’éclaire dans un bal élégant de faisceaux lumineux. Les lampes perchées sur la tête des musiciens s’agitent comme autant de petites lunes mobiles. Les morceaux s’égrainent et l’on s’enfonce plus profondément encore dans la nuit, bercés par une scénographie rêveuse et les notes aériennes du hang qui s’entremêlent à celles des vents et des cordes. Sous le regard d’une chouette qui veille sur sa branche, ou d’une horloge dont les aiguilles ne cessent jamais leur course, Manu Delago fait scintiller son album Circadian aux ambiances nocturnes.

Le public, sous le charme du voyage, se lève à la dernière note pour acclamer la force vive de la musique qui délie les âmes et les fait battre à l’unisson. Le concert de Manu Delago aura sonné comme un clin d’œil accidentel à l’assoupissement (provisoire !) de la musique live. Et à l’heure des concerts assis, quel plus beau symbole qu’une standing ovation ?

Camille : Le hang a l’air d’un instrument traditionnel, alors qu’il a été inventé très récemment en Suisse par Felix Rohner et Sabina Schärer. Comment as-tu découvert cet instrument ?

Manu Delago : Mon père m’a parlé de cet instrument en 2003. Ensuite, nous en avons acheté un ensemble, et j’en suis très vite tombé amoureux. Donc j’en ai acheté un autre, et encore un autre. C’était une superbe occasion d’explorer un nouveau territoire musical.

C. : Ton album Circadian est sorti en septembre 2019, et s’inspirait de ton court-métrage Parasol Peak – The Transixing Circadian. D’où t’es venue cette idée ?

MD. : Parasol Peak a été une extraordinaire expérience de groupe mais aussi une aventure assez extrême puisque nous avons enregistré toute la musique en live dans les montagnes. Je voulais garder cet élément humain et avoir beaucoup de sons orchestraux, mais Circadian a été enregistré dans un studio chaud et confortable. L’album a donc revêtu des ambiances plus rêveuses. L’année 2018 a été très intense pour moi à cause d’un manque de sommeil en tournée, j’ai commencé à lire de plus en plus sur le sommeil. J’ai pris conscience et apprécié chaque heure de sommeil.

C. : Le titre « Circadian » renvoie aux cycles du sommeil. Peux-tu nous expliquer comment ça marche ?

MD. : Le titre signifie littéralement « le cycle d’une journée ». J’ai utilisé des thèmes nocturnes variés comme les rythmes biologiques du corps, le sommeil, les chouettes ou les rêves. L’album devient de plus en plus lent et au milieu de l’album, on trouve le morceau Delta Sleep qui symbolise la phase profonde du sommeil. L’album se termine avec un appel à se réveiller qui prend forme dans le track Zeitgeber.

C. : En septembre 2020, un an après, tu as sorti une version live de Circadian. Tu t’es entouré d’une équipe de talents pour l’enregistrer. Comment les as-tu choisis ?

MD. : L’ensemble de neuf musiciens a évolué durant ces 5 dernières années. Certains musiciens jouaient déjà sur Parasol Peak, d’autres faisaient partie de mes collaborateurs de longue date. Avoir mon propre ensemble de cette dimension, c’était un rêve qui se réalisait. C’est assez gros pour le côté orchestral, mais assez petit pour avoir des liens proches et que chacun ait l’espace de briller. Après la première répétition, j’ai su que cet ensemble et cette tournée seraient une occasion unique de produire un album live.

C. : Vous avez enregistré 18 concerts avec le groupe. Comment avez-vous choisi les titres que l’on entend sur la version définitive de l’album ? Comment ces morceaux ont-ils évolué depuis la version studio ?

MD. : J’ai dû écouter beaucoup d’enregistrements, nous avons beaucoup enregistré de concerts. J’ai fait quelques randonnées avec mes écouteurs sur les oreilles, et je me suis forcé à faire des écoutes, très concentré. Habituellement, je n’écoute pas ma propre musique, mais dans ce cas, je devais le faire pour réaliser la meilleure des sélections. Les morceaux sont devenus plus vivants que dans la version studio et nous avons aussi ajouté quelques improvisations sur certains d’entre eux. Il y a aussi mes morceaux favoris depuis le début qui étaient présents dans nos différents lives.

C. : En 2021, tu te lanceras dans la tournée ReCycling Tour. Peux-tu nous en dire plus ? Quel sera l’impact majeur sur ta tournée ?

MD. : Pour ce ReCycling Tour, mon groupe va pédaler sur 1600 kilomètres et jouer 26 concerts en chemin. Nous transporterons tout notre équipement dans des remorques à vélo qui seront également équipées de panneaux solaires pour générer de l’électricité pour nos concerts. Nous essaierons de réduire nos déchets, économiser de l’énergie, manger de la nourriture durable, voyager sans émission de CO2, et idéalement, inspirer beaucoup de gens et les inciter à faire de même.

C. : Tu es parti faire ton Alpine Sound Expedition pour créer ton album Parasol Peak, tu prévois ton ReCycling Tour en 2021… Tu as l’air d’avoir une grande conscience écologique. Comment la nature influence-t-elle ta création ?

MD. : Pour moi, la musique a toujours été de la musique et rien d’autre. Mais ces dernières années, je me suis rendu compte que je devenais une figure publique, et que c’était un tremplin pour délivrer des messages qui comptent pour moi. J’aime la nature et les montagnes et j’essaie de vivre ma vie en étant le plus respectueux de l’environnement possible. Et en tant qu’artiste public, j’essaie d’inspirer d’autres personnes. 

C. : Et comme c’est la tradition chez Arty Magazine, quelle est ta définition d’un artiste ?

MD. : Pour moi, les artistes sont des personnes qui ont des idées uniques et qui entrent dans de nouveaux territoires. Ce sont des créateurs qui élargissent l’horizon de l’humanité.

Circadian Live est disponible sur Spotify.

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