Home Ciné #02 : « Peau d’âne », chef d’oeuvre féerique, pop et poétique
En attendant de s’installer en Islande entourée de ses films…
Pendant toute la durée du (re)confinement, Arty te propose ses Home Ciné, un lieu convivial où nos rédacteurs et journalistes présenteront leurs films préférés. Ceux qu’ils ont vu à 6 ans, ceux qu’ils ont découvert suite à leur première rupture amoureuse, ceux qu’ils dévorent avec un paquet de chips chaque dimanche soir depuis dix ans… Bref, tous ces films de leur vie qu’ils souhaiteraient te faire découvrir, là, maintenant.
Aujourd’hui, Alma-Lïa nous présente Peau d’âne, de Jacques Demy, 1970.
La Reine mourante a fait promettre au Roi de n’épouser après sa mort qu’une femme plus belle qu’elle. Dans tout le royaume, une seule personne peut se prévaloir d’une telle beauté : leur propre fille. Déguisée d’une peau d’âne et avec l’aide de sa marraine la fée, la princesse désespérée s’enfuit du château familial. Devenue souillon dans une ferme, la visite d’un Prince est l’occasion pour elle de s’échapper de son triste sort. Adaptation cinématographique du conte de fée de Charles Perrot, le chef d’oeuvre musical de Jacques Demy nous offre un univers féerique entre pop et poésie, à l’esthétique électrique haute en couleur, un monde en-chanté dans lequel les trônes sont des chats pelucheux et les roses nous parlent.
Du merveilleux à la réflexion
D’un côté, Peau d’âne est un film de l’innocence, rythmé par les chansons cultes de Michel Legrand, mettant en scène une Catherine Deneuve au visage d’ange qui chante son amour au si beau Prince Jacques Perrin. Le réel est alors merveilleux, on y voit des châteaux remplis de lierres, de chevaux colorés et de perroquets qui chantent, et nous contemplons de belles robes aux reflets du temps. Le travail fourni pour la création du décors et des costumes participe largement à l’état d’émerveillement dans lequel le film nous plonge, et rien que pour eux, le film mérite d’être vu. Quant aux dialogues, ils offrent au spectateur une vision si simple du monde qu’ils développent une forme de naïveté poétique, non sans humour, propre au cinéaste.
Mais d’un autre côté, c’est un film qui se réinvente à chaque visionnage et qui manie avec une telle élégance une multitude de réflexions, sur l’inceste, sur la jalousie, sur la mythologie des familles et des sociétés, et enfin sur la beauté. C’est un film qui s’interroge sur la question du bonheur et qui nous plonge dans des paradis, artificiels ou non, comme ceux des pipes à opium qu’ils fument en cachette dans leurs chansons. C’est aussi un film qui pense ses décors, qui pense ses images et le cinéma, construisant ainsi une esthétique audacieuse qui définit l’identité du cinéaste, et n’aura de cesse d’inspirer de nombreux réalisateurs après lui.
De 7 à 77 ans, inconditionnellement
Le film valse alors entre une simplicité pétillante qui nous plonge dans une légèreté enivrante, et une réelle profondeur, celle de ses réflexions, de ses références, celle de la beauté de ses textes et du jeu de ses acteurs. Hommage à Jean Cocteau, mais aussi à Guillaume Apollinaire et à tant d’autres maîtres de la littérature, le film est porté par des acteurs parmi les plus grands du cinéma français, Deneuve, Perrin, mais aussi Delphine Seyrig et Jean Marais.
Que tu recherches une évasion poétique, la simplicité d’un conte de fée, des chansons cultes, de belles images, un hommage littéraire, un univers pop des années 70 ou encore un chef d’oeuvre du cinéma français, Peau d’âne te surprendra à chaque fois, que tu sois petit ou grand, et que tu ne l’aies jamais vu ou déjà vu mille fois.